• "Les fragments d'Antonin" de Gabriel Le Bomin

    En 1919, Antonin, un instituteur, est retrouvé errant sur les routes. Comme soldat, il a combattu dans un des régiments les plus exposés de la Grande Guerre, et a été grièvement blessé. Psychologiquement détruit, il échoue dans un château transformé en hospice, dirigé par le professeur Labrousse. Celui-ci tente de le sortir de son enfer en utilisant une méthode inédite : lui faire revivre consciemment les moments atroces qu'il a vécus pour qu'il puisse ensuite les éliminer de son esprit. Antonin revoit donc l'unité dans laquelle il avait été affecté et Madeleine, l'infirmière alsacienne dont il était secrètement amoureux et à qui il avait confié son journal...

    Article dans "Télérama" :

    1919, dans un institut psychiatrique. Les plaies d'Antonin Verset sont invisibles : il souffre de choc traumatique. Un psychiatre tente de déchiffrer le regard hanté de son patient à travers les rares mots qu'il prononce encore, les « fragments » d'une mémoire sidérée.

    Entre la reconstitution classique et le « cas clinique » démonstratif, le film trouve un ton personnel. Il se nourrit de l'expertise du cinéaste, mais épouse, dans sa forme, le schéma mental d'Antonin. Chaque sursaut trouve sa raison d'être dans un flash-back. Là, pas d'effets spectaculaires : les tranchées, l'agonie sont filmées à hauteur d'homme. Nous percevons ce qu'Antonin perçoit : des éclats de violence qui se plantent en lui. La guerre est trop énorme pour le regard d'un homme. C'est une folie qui finit par le faire éclater.

    Gabriel Le Bomin cisèle l'humanité de ses personnages, de Madeleine l'infirmière (Anouk Grinberg, formidable) au professeur Labrousse (Aurélien Recoing, impressionnant)... Surtout, Grégori Derangère compose avec tact un Antonin multiple, singulièrement proche jusque dans sa folie. Une « gueule cassée » de l'intérieur. — Cécile Mury

     
     
     

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